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Ni
loi, ni voile
Combattons pour la laïcité et
l’égalité des droits
La loi Chirac-Ferry
interdisant à l’école le port de signes religieux « ostensibles » a
ravivé, sinon ouvert, le débat dans l’ensemble de la société française,
mais aussi au sein même des organisations de gauche, qu’elles soient
politiques, syndicales ou associatives. Plusieurs questions de fond
soutendent ce débat et le rendent ardu : la laïcité, la place des
populations issues de l’immigration dans la société française et,
beaucoup l’oublie, la place des femmes dans leur ensemble.
La LCR dénonce cette loi qui
sera bien incapable de combattre le voile. En effet, promulguée par un
gouvernement qui multiplie les dispositifs de ségrégation et développe
une politique ultra sécuritaire, elle sera vécue comme une mesure
d’exclusion supplémentaire par les populations issues de l’immigration
de confession musulmane. Elle aggrave d’ores et déjà le racisme ambiant
pour le plus grand profit de Le Pen, cela dans un contexte marqué par
l’offensive de l’impérialisme américain justifiée par le discours
manichéen sur le « choc des civilisations »
Pour la LCR, défendre la
laïcité c’est d’abord lutter contre la marchandisation de l’école et le
travail de sape des fondamentalismes religieux de tout poil, qui font
leur beurre de la casse libérale de l’école publique. Les axes de
bataille sont nombreux : abolition du statut d’Alsace-Moselle, fermeture
des aumôneries dans les établissements publics, arrêt des financements
publics aux écoles privées qui sont à 90 % confessionnelles, faire de
l’éducation une véritable priorité, notamment dans les quartiers
défavorisés, en donnant les moyens à l’école de remplir ses missions, y
compris en matière de soutien scolaire. Actuellement la laïcité est bien
plus remise en cause par un gouvernement dont le premier ministre
assiste à la canonisation de religieuses au Vatican aux frais du
contribuable, que par les rares jeunes filles se présentant voilées à
l’école…
Mais derrière le voile la
question est posée de l’oppression des femmes. On ne saurait rester
neutre face au port du voile, car, quelle que soit sa motivation qui est
diverse, il est un instrument qui signifie publiquement l’infériorité de
la femme vis-à-vis de l’homme, et doit être, en ce sens, clairement et
fermement combattu. La généralisation du port de cet insigne religieux
discriminatoire aurait pour conséquence la dégradation de la situation
des femmes. Situation qui ne se résume pas, bien sûr, à la question du
voile, mais tous les fondamentalismes religieux qui luttent pour un
recul et une destruction du droit des femmes ne rêvent que de
s’engouffrer dans la brèche.
Nous savons que le port du
voile, comme tout acte de repli identitaire, renvoie au creusement des
inégalités, à la formation de ghettos sociaux, à l’exclusion sous toutes
ses formes. Mais comprendre n’est pas accepter. Si le reflux des
phénomènes identitaires nécessite une politique de rupture sociale et
démocratique pour laquelle nous luttons au quotidien (défense des
services publics, lutte pour l’égalité politique et sociale…), il existe
aussi un devoir impératif de protéger celles qui ne veulent pas le
porter. A l’école, notre position consiste à faire tomber les voiles par
le dialogue pédagogique avec les élèves et les familles. Il s’agit de
tout faire pour éviter des exclusions qui sont toujours des défaites,
mais sans reculer non plus sur le devoir de protection lorsqu’il s’agit
clairement d’une opération militante.
Ni loi ni voile donc, mais
surtout, dans le débat aussi passionné que réducteur que focalise le
port du voile à l’école, il est de notre responsabilité de ramener la
discussion à ses véritables enjeux, sociaux et démocratiques.
Marie-Cécile Perillat |
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Une
interview d’Odile Baral du syndicat de la magistrature
Loi Perben II : Nous sommes tous des bandes organisées
Après les Lois Sarkozy et
Perben 1, ils en remettent une couche afin de renforcer encore plus leur
arsenal répressif. C’est bien une société du tout pénal qu’ils nous
préparent ainsi. Pour la première fois depuis longtemps des magistrats,
des avocats et des juristes se sont mobilisés. Le danger n’est pas
toujours visible et après le matraquage médiatique et politique sur le «
sentiment d’insécurité » il est facile au gouvernement de faire adopter
ces lois, gravement liberticides. Il est vrai que tout le monde devrait
se sentir concerné par le dispositif mis en place, la mobilisation n’est
guère à la hauteur des attaques, pourtant centrales et lourdes de
conséquences.
Nous avons demandé à Odile
Barral, magistrate toulousaine, membre du Syndicat de la Magistrature et
animatrice du Collectif Toulouse Libertés, de répondre à quelques
questions.
Le Piment Rouge : Quels
sont les grands traits de la loi Perben 2 ?
Odile Barral : La loi
Perben crée un régime dérogatoire dans la procédure pénale qui étend de
façon considérable les pouvoirs des services d’enquête, lorsqu’ils
estimeront avoir affaire à de la « criminalité organisée » : extension
de la durée de la garde à vue à quatre jours, possibilités de
perquisitions de nuit,
d’écoutes téléphoniques, et
bien d’autres exemples…
Mais cette notion est des
plus vagues et peut être invoquée dès qu’il s’agit de plusieurs
personnes s’étant un minimum concertées. Elle pourra concerner des
mineurs, ce qui montre d’entrée que ce texte ne concernera pas que la
lutte contre la mafia, le grand banditisme ou le trafic de stupéfiants à
une grosse échelle…
Les policiers pourront très
bien estimer qu’ils sont dans ce cadre au départ de leur procédure puis
revenir ensuite au cadre habituel, sans qu’aucune nullité ne soit
encourue ; il sera donc très tentant pour eux d’utiliser ces pouvoirs
plus larges, quitte à revenir ensuite à la procédure ordinaire.
La loi crée également le
principe du « plaider coupable » ; la personne impliquée dans une
infraction pourra se voir proposer une peine par le procureur, si elle
accepte, la peine sera prononcée sans audience publique, et sans même
que la présence d’un avocat soit obligatoire ; Le risque est grand là
aussi que certaines personnes, surtout si elles sont confrontées à la
justice pour la première fois, acceptent n’importe quoi pour être
tranquilles et reconnaissent par exemple des choses qu’elles n’ont pas
faites.
Un troisième point essentiel
est le glissement de prérogatives des juges du siège aux magistrats du
parquet, alors même que leur statut n’a toujours pas été réformé pour
les rendre plus indépendants du pouvoir exécutif. Le juge des libertés
et de la détention qui est censé contrôler la procédure est nommé dans
cette fonction par le président du tribunal, et non choisi par décret
comme c’est le cas du juge d’instruction ; il pourra donc être remplacé
si sa pratique ne convient pas.
Au total, c’est un
affaiblissement des contrôles de l’autorité judiciaire.
Il ne s’agit là que de
certaines dispositions d’un texte très volumineux et très technique
P. R. : Comment cette loi
s’inscrit-elle dans la contitnuité des lois Sarkozy et de la première
loi Perben ?
O. B. : Cette loi
s’inscrit dans le contexte des lois sécuritaires Sarkozy-Perben 1 en ce
sens qu’il s’agit de la restriction de libertés dans l’intention
affichée d’assurer plus de sécurité : ce faisant, on perd de vue d’une
part que tout citoyen doit être protégé contre l’arbitraire d’un
gouvernement, or en l’espèce on fait l’inverse, et d’autre part que la
recherche de la sécurité doit se faire par un rétablissement des liens
sociaux et non pas en durcissant des textes pénaux qui étaient déjà
sévères avant même l’arrivée de Sarkozy et de Perben.
Leur point commun est de
tenter de faire croire que tout se résoudra par la loi pénale, ce qui
est une tromperie.
Un des liens existants entre
les deux lois Perben, est une défiance viscérale à l’égard des mineurs,
dont le régime pénal devient à certains égards plus sévère que celui des
majeurs.
P. R. : Comment peut-on
définir ces projets politiques, les conséquences et les dangers ?
O. B. : L’idée générale
de tous ces textes me semble être de renforcer toujours plus le fossé
entre « les honnêtes gens » (où figurent probablement les restaurateurs,
les buralistes, etc.) et les « autres », parfois gravement stigmatisés
comme dans la loi Sarkozy. Un risque évident est donc celui d’attiser la
« haine » de tous ceux qui ont le sentiment, à juste titre souvent, de
n’avoir pas leur place dans cette société.
Une particularité de la loi
Perben me semble cependant être qu’elle pourrait bien finir par
s’appliquer à n’importe qui et donc éventuellement aux « honnêtes gens »
cités plus haut.
Évidemment on peut faire le
pari qu’elle s’appliquera surtout aux plus pauvres.
P. R. : On parle souvent
de régression sociale en évoquant les mesures du gouvernement Raffarin,
peut-on également parler de régression du droit ?
O. B. : On peut
effectivement parler de « régression du droit » en ce sens qu’après la
loi de juin 2000 qui avait apporté des garanties tout à fait importantes
pour les droits de la défense, on revient tout à fait en arrière. Le
Syndicat de la Magistrature a déposé un argumentaire important devant le
Conseil constitutionnel sur l’inconstitutionnalité de la loi, et nous
pensons également que ce texte n’est pas conforme dans toutes ses
dispositions à la convention européenne des droits de l’homme qui
s’impose à la France. Il n’est pas exclu que la France soit condamnée un
jour pour avoir édicté ce texte.
P. R. : Après les
discours sécuritaires de tous bords n’est-il pas difficile et compliqué
de s’opposer à ces lois ?
O. B. : Il n’est pas
facile effectivement de s’opposer à ces lois, et on a parfois le
sentiment de crier dans le désert.
Reste que les gens
lorsqu’ils sont confrontés à la justice, sont souvent étonnés de la
lourdeur des sanctions et dans ce cas découvrent avec étonnement la
dureté des textes, lorsqu’un de leurs proches est concerné.
Je suis convaincue qu’il
faut continuer à réaffirmer nos valeurs tout en expliquant au maximum.
La façon dont une partie des luttes sur la double peine a été reprise au
moins dans l’argumentaire me semble montrer que progressivement des
idées finissent par cheminer.
Je crois donc essentiel de
ne pas baisser les bras.
Propos recueillis
par Jacques Verrières |
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Pêche aux voix
Quand Douste chausse les bottes
de Le Pen
Douste-Blazy se caractérise
surtout par son ambition, sa carrière est la seule chose qui puisse
l’intéresser. Du coup, entre deux élections, il est toujours en campagne
électorale.
Ses actions, ses
déclarations ne vont que dans un seul sens : caresser dans le sens du
poil ses électeurs et ceux qui pourraient l’être.
Les pauvres, les exclus, les
accidentés de la vie ne votent pas ou si peu. Et s’ils devaient voter
cela ne serait certainement pas pour Douste et l’UMP.
Aussi lorsque des
responsables d’associations de commerçants « l’alertent sur une
recrudescence de l’insécurité dans le centre ville » celui-ci
s’exécute. Il se fend alors d’une lettre adressée à l’ensemble de la
population du centre ville pour une nouvelle stigmatiser les pauvres,
les SDF, qui seraient –selon lui – responsables de cette recrudescence.
Mais les commerçants ne sont
pas les seuls à voter, il y a d’autres électeurs. Douste profite donc de
ce courrier pour les rassurer et leur montrer qu’il pense à eux : « j’ai
demandé à Monsieur le Préfet un renforcement des rondes de police dans
le centre. Je considère qu’il est impératif que les Toulousains puissent
vivre dans le centre ville, faire leurs achats, se promener sans
craindre d’être agressés. »
Sans vergogne, lui qui
soutient un gouvernement (il aurait d’ailleurs tant aimé en faire partie
!) qui s’attaque sans arrêt, juridiquement, mais aussi économiquement
aux exclus, aux immigrés, aux chômeurs, aux rmistes, il écrit avoir «
fait des efforts importants pour aider les publics fragilisés ». En
oubliant de préciser que ce public est surtout fragilisé par la
politique du gouvernement Raffarin. Mais il argumente : « nous avons une
politique sociale qui apporte du réconfort à ceux qui sont les plus
démunis. » Du réconfort ? comme si un homme politique se devait d’amener
du réconfort !
Il se trompe de mission, le
réconfort est une consolation. Un chômeur a besoin d’un travail, un SDF
a besoin d’un toit, et non de réconfort ! Cela en dit long sur la notion
de partage et de solidarité du maire.
Douste tient ensuite à
rassurer une nouvelle fois ses électeurs, ce n’est pas parce qu’il en
fait beaucoup pour les pauvres qu’il va continuer. Aussi devront-ils
être « réconfortés » ailleurs que dans le centre ville car il «
s’opposera à accepter le projet d’implanter rue Peyrolières un centre
supplémentaire d’accueil pour personnes en difficulté ». Le message est
clair : ce n’est parce que la société produit des pauvres qu’elle doit
les supporter et les voir en centre ville.
Le terme « supplémentaire »
est important car Douste tente de faire croire qu’il fait le nécessaire
concernant l’hébergement, alors que depuis des années des associations
l’alertent sur le manque cruel de places disponibles, notamment en
hébergement d’urgence. Mais il traite les « alarmes » en les
sélectionnant. Jamais après avoir été sollicité par les associations
Douste est intervenu comme il le fait avec ce courrier. Et cet hiver
encore de nombreuses personnes n’auront comme seule alternative de
dormir dehors !
Problèmes de délinquance ?
Chassons les pauvres !
Douste-Blazy, comme Sarkozy
et Perben, comme Le Pen, transforme la pauvreté en délit. Il se comporte
en politicien démagogue et irresponsable. Il court désespérément après
les voix du FN. Niant le sens de la République, qu’il cite pourtant dans
ce courrier, il oublie qu’un élu doit traiter de façon égalitaire et
sans exclusive tous les citoyens et citoyennes. Il fait ainsi appel à ce
qu’il y a de plus bas : la peur de l’autre, la peur de la différence,
l’exclusion des exclus, la stigmatisation des uns et des autres.
C’est bien petit tout ça,
Douste a bien raison d’avoir de l’ambition, il que ça de grand !
Jacques Doblin |
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Contre la délation et le contrôle social
Stoppons Sarkozy
Le dernier projet de loi de
Sarkozy, "pour la prévention de la délinquance", confond volontairement
prévention et répression , en amalgamant difficultés sociales et
délinquance.
La mobilisation doit
s’amplifier pour défendre nos droits et l’existence du social.
Parallèlement à sa politique
libérale et antisociale, le gouvernement met en place une logique du
tout-sécuritaire ("La main invisible du marché a besoin d’un gant de
fer") : Après avoir pénalisé la pauvreté et légitimé toutes les
interventions arbitraires des policiers (loi sur la "sécurité
intérieure", Sarkozy I), après avoir durci l’accès aux droits pour les
étrangers et réduit le droit d’asile (loi Sarkozy II), après avoir
modifié la procédure pénale et accrue avant-tout les pouvoirs de la
Police au détriment de la Justice, sous couvert de lutte contre la
"criminalité organisée" (loi Perben I+II), le gouvernement
Chirac-Raffarin-Sarkozy veut aujourd’hui accroître le contrôle social,
sous prétexte de "lutte contre la délinquance".
En effet, l’avant-projet de
loi "pour la prévention de la délinquance" prévoit avant tout
l’obligation pour "tout professionnel qui intervient au bénéfice d’une
personne présentant des difficultés sociales, éducatives ou matérielles
[...] d’informer le Maire" (art. 11). C’est bien la délation d’au moins
9 millions de personnes qui est prévu, voire de tout le monde à part
quelques riches et privilégiés (qui peut prétendre être protégé contre
toute difficulté ?) : le temps des "classes dangereuses" est de retour.
Les missions éducatives et
sociales de tous les intervenants sociaux sont donc modifiés dans ce
sens (entre autre par l’intermédiaire de différents "comités"). Et les
autres mesures proposées dans l’avant-projet de loi sont du même acabit
: généralisation de la vidéo-surveillance dans les lycées et immeubles,
expulsion du logement facilitée et simplement décidée par le bailleur,
stage de "soutien à la parentalité" au frais des parents d’élèves trop
absentéistes,... C’est le Maire qui prend la place centrale dans ce
dispositif répressif, un peu comme un Shérif à l’américaine.
La logique sécuritaire - le
recentrage de l’action sociale, de toute politique sociale, sur des
préoccupation de "tranquillité publique" et de "régulation" - n’est
malheureusement pas nouvelle : les gouvernements précédents - et entre
autre celui de la "gauche plurielle" - avait déjà instauré des
dispositifs de "concertation" entre intervenants sociaux et les "forces
de l’ordre" par de "l’information partagée" (dans le cadre des Contrats
Locaux de Sécurité).
Mais aujourd’hui il s’agit
bien de défendre l’existence même de l’éducation et du social face à
leur subordination à l’appareil policier et pénal, défendre nos libertés
contre la mise en place d’une société autoritaire. Car même si le
gouvernement de droite prétend combattre le Front National en
s’attaquant à sont terreau ("l’insécurité"), il met en place une partie
de son programme.
La mobilisation s’organise
un peu partout en France, avec comme première échéance une journée
nationale de grève et de mobilisation (à l’appel de plusieurs syndicats,
associations et collectifs) le mercredi 17 mars. Une manifestation
nationale a lieu à Paris et une autre à Toulouse (14h - pl;ace.
Saint-Etienne) appelée par le Collectif toulousain "Résistance à la
délation" (dont les réunion plénières rassemblent entre 90 à 180
personnes).
Partie des travailleurs
sociaux, rejoints par des enseignants et citoyens, la mobilisation doit
s’élargir et converger avec les autres luttes contre les attaques
actuelles.
Daniel Baer
Pour se tenir informé : www.abri.org/antidelation
(ou encore www.truc.abri.org/libertes) |
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Affaire Battisti
À la Santé !… Les droits de
l’homme
En septembre 2002 le
gouvernement CRS arrêtait et extradait Paolo Persichetti, ex-militant de
l’Union Communiste Combattante. Depuis son retour forcé en Italie, Paolo
est incarcéré (pour plus de 20 ans !!). C’est maintenant au tour de
Cesare Battisti d’être menacé par une extradition qui le conduirait lui
aussi tout droit dans une prison italienne pour de nombreuses années.
Nous appelions dans les
colonnes du Piment Rouge, en octobre 2002, à la constitution d’un comité
unitaire d’information et de soutien aux camarades italiens. Cela est
hélas encore d’actualité et urgent, n’oublions pas que 150 anciens
militants de l’extrême gauche italienne sont réfugiés en France, et que
l’extradition de Cesare en laisserait préjuger bien d’autres. Le Piment
Rouge publie un texte de l’écrivain Mouloud Akkouche. Nous le remercions
pour sa contribution.
Depuis le 10 février,
l’écrivain Cesare Battisti est incarcéré injustement à la Santé. Malgré
les protestations contre ce déni de justice (en droit français, on ne
rejuge pas deux fois pour les mêmes faits), il croupit toujours en
prison. De loin en loin, certains nous accusent de corporatisme et
d’oublier toutes les autres iniquités. Cesare Battisti, je le connais
sans être un vrai proche et la plupart des gens se battant pour lui ne
le connaissent pas du tout ; ils ne se mobilisent pas pour un auteur
mais contre une injustice flagrante. Par-delà le cas Cesare Battisti,
ils veulent défendre leurs libertés individuelles bouffées de plus en
plus par certains carnassiers en 605 et cocardes. Mais je ne peux nier
que les nombreux salons polar créent des affinités électives (pour
déranger un peu Goethe qui écrit aussi des textes noirs) et amitiés
ponctuelles et intenses qui, malgré les distances et le temps, perdurent
et s’amplifient à chaque retrouvaille. Pourquoi d’ailleurs son statut
d’auteur devrait-il être un handicap et culpabiliser cette lutte ? En
réalité, cet homme est aussi devenu malgré lui un symbole : une espèce
d’arbre qui cacherait les injustices présentes et surtout celles plus
nombreuses à venir. Gagner pour lui serait une victoire pour nous tous.
Aiguillée par Claude
Mesplède de Toulouse, la lutte dont la décentralisation a été une des
clefs de la réussite continue de s’étendre. Quoi qu’il en soit, ne nous
reposons pas sur nos lauriers, il faudrait l’élargir à une plus grande
catégorie de la population car la date fatidique du 3 mars se pointe
dangereusement à l’horizon. La libération ou non de Cesare Battisti ? La
victoire ou non de la justice ?
Pour conclure, il me semble
important pour une bagarre concernant un auteur d’ouvrir les guillemets
et laisser parler ses mots – eux, encore libres :
« Je ne crois pas avoir eu
l’intention de me mettre sur le même plan que les résistants. La
différence sautait aux yeux : ils subissaient l’occupation nazie et
fasciste, tandis que nous, nous avions la démocratie chrétienne, le
parti communiste… Des élus du peuples protégés par des carabiniers.
Mais, à regarder de plus près, Hitler et Mussolini avaient eux aussi
remporté démocratiquement des élections même si on les assimile
aujourd’hui à deux “putschistes”».
Le cargo sentimental,
éditions Joëlle Losfeld
« Les histoires qui
s’achèvent avec la prétention d’avoir tenu les promesses du départ
appartiennent à la démagogie des vainqueurs. Les vaincus, eux, traînent
leurs promesses jusqu’à la tombe. Quant à ma propre histoire, j’ai fini
par m’en dépouiller. Une fois expulsées les cellules cancérigènes, les
maladies prennent la voie de la guérison. J’ignore le moment précis et
les raisons qui m’ont poussé à imprimer un tournant à ma vie, mais j’ai
probablement compris (…) que j’étais arrivé au terminus, et cela a
constitué mon salut. J’ai échappé au boyau mortel dans lequel je m’étais
fourvoyé par un simple glissement de l’angle sous lequel j’observais les
choses. Improbable, direz-vous, mais cela arrive. Tout le monde n’a pas
eu ma chance ».
Dernières cartouches,
éditions Joëlle Losfeld, réédition chez Rivages/Noir.
[Ces extraits proviennent
d’une compilation initié par Olivier Douyère sur vialibre5.com. J’en
profite aussi pour donner le site de la gazette(centre d’aiguillage de
la lutte) : cesarebattisti.free.fr]
Mouloud Akkouche
La création de comités de
soutien (comme à Toulouse), les dizaines de milliers de signatures, les
rassemblements ont payé. Le 3 mars Cesare a été libéré en attendant
l’examen de la demande d’extradition le 7 avril.
À sa sortie de prison Cesare
a déclaré : « Il faut se mobiliser pour les autres réfugiés italiens qui
ne sont pas écrivains et qui risquent la même chose que moi. (…) Je
pense aussi à Nathalie Ménigon en train de crever en prison ».
Le combat continue… |
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Toulouse vivante
Sauvons Mix’Art Myris
L’association Mix’art Myrys
a été contrainte d’occuper à plusieurs reprises des locaux et notamment
depuis 3 ans ceux situés au 33 rue de Metz à Toulouse.
Pourtant cette association a
à plusieurs reprises pris contact avec la Mairie de Toulouse, le Conseil
général de la Haute-Garonne, le Conseil régional de Midi-Pyrénées et les
services de l’État par l’intermédiaire de la DRAC, afin d’étudier les
solutions financières et techniques possibles. Aucun refus formel ne
leur a jamais été signifié. Par contre aucune proposition concrète ne
leur a été faite, ni en terme de lieu, ni en terme de financement.
Le jeu malsain des
collectivités territoriales
La situation de blocage
actuelle n’est donc en aucun cas de la responsabilité le Mix’Art Myrys
mais celle des collectivités en question, en particulier de la Mairie de
Toulouse qui leur oppose un refus catégorique à chaque nouvelle
proposition de lieu, le dernier en date étant celui de la rue Corneille.
Lors de sa visite à Toulouse
le 2 février 2004, le ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, a
déclaré : « Art ou pas, un squatt est un squatt, une atteinte à la
propriété ». Cette menace est lourde de conséquence pour Mix’Art Myrys
et présage d’une expulsion imminente.
En tant qu’élus LCR 100 % à
gauche nous avons immédiatement réagis, Lucien Sanchez et moi-même, et
nous avons écrit le 5 février au maire de Toulouse, aux présidents du
Conseil général et du Conseil régional, au directeur de la DRAC : «
Cette association a toujours, par le passé, montré son grand sens des
responsabilités. Ce regroupement d’artistes cherche depuis une dizaine
d’années une solution viable pour poursuivre ses activités. Nous
considérons les artistes qui le composent comme utiles à la création et
ce lieu nécessaire pour la diffusion de cultures en général exclues des
canaux officiels. Nous nous opposons par avance à toute mesure
d’expulsion de ce collectif des locaux qu’il occupe. Nous demandons à
toutes les collectivités territoriales et aux services de l’État de
convoquer immédiatement une réunion avec Mix’Art Myrys pour leur
proposer concrètement une solution viable pour leur projet et un nouveau
lieu pour s’installer. »
Le même courrier a été
adressé au rectorat et au préfet de la Haute-Garonne pour leur demander
de « ne pas procéder à l’expulsion ».
Bien entendu nous avons
participé au « référend’art d’initiative populaire et citoyenne »
organisé par Mix’art et voté en soutien. Il est important de continuer à
envoyer des soutiens à : soutien@mixart-myrys.org.
À l’heure où l’application
du nouveau régime des intermittents du spectacle, impulsé par ce
gouvernement et le Medef, va mettre sur la paille les trois quarts
d’entre eux, et particulièrement les femmes qui attendent un enfant, la
mobilisation doit continuer et s’amplifier.
Éliane Assanelli,
conseillère régionale
membre de la commission
Culture |
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