Ligue

Communiste

Révolutionnaire    

Midi-Pyrénées

Le Piment Rouge est édité par les Fédérations de Midi-Pyrénées de la Ligue Communiste Révolutionnaire.

Écologie

 

 

Traversée centrale des Pyrénées

Un projet inutile et pharaonique

Les tenants locaux de l’ancienne gauche plurielle ont enfin trouvé un projet à la mesure de leurs ambitions : percer les Pyrénées grâce à un tunnel dans la partie la plus large pour permettre de doubler le trafic de marchandises entre la France et la péninsule ibérique et au-delà.

 

Ce projet qui ferait de ce tunnel le plus cher jamais percé est certes à la mesure des ego de nos élus. La devise hollywoodienne qui veut que le film le plus cher soit le plus populaire trouve ici une application inédite. Il n’est pas certain que le contribuable ait la même conception de l’emploi de ses deniers.

D’autant qu’il suffit de se poser quelques questions pour comprendre qu’il y a, derrière ce projet, un choix de société. La gauche, hier plurielle, a encore fait les mauvais choix !

Au profit de qui engagerait-on de telles dépenses ? On connaît les mœurs politico-commerciales des rares entreprises capables d’assumer un tel chantier, mais c’est, ici, moins le chantier que ses objectifs que nous voulons aborder.

 

Améliorons d’abord l’existant

 

On nous dit : mieux vaut le train que la route. C’est effectivement ce que nous pensons avec les populations alpines qui subissent un trafic de poids lourds insupportable. C’est également pour cette raison que nous avons soutenu les opposants au tunnel routier du Somport qui n’ont guère été entendus par les gouvernements d’aujourd’hui ou d’hier. Commençons donc par soulager les deux extrémités de la chaîne pyrénéenne en développant les voies maritimes et ferrées et en les imposant au trafic qui ne fait que traverser la France (plus de la moitié du trafic terrestre actuel) plutôt que de réserver tous les fonds pour un tunnel au centre de la chaîne. D’autant que ce tunnel ne détournerait pas le trafic actuel et que le débouché de la voie ferrée, s’il était à Tarbes, se traduirait par une saturation de la plaine tarbaise par les poids lourds ! Ce tunnel serait, nous dit-on, indispensable pour absorber l’équivalent de ce qui transite actuellement aux deux bouts de la chaîne : un doublement du trafic de marchandises à travers les Pyrénées est annoncé comme inéluctable dans les vingt ans à venir ! Les populations de Bayonne et de Perpignan devraient-elles donc se résigner à subir les camions, celle de Tarbes a en faire l’expérience ?

 

Défendre et étendre le service public

 

De plus, quand nous jugeons le rail préférable à la route, c’est aussi en pensant au service public, à la SNCF. Nous connaissons les dégâts provoqués par la privatisation des chemins de fer britanniques. Cela n’a pas pour autant empêché les élus du PS au Parlement européen de voter récemment une accélération de l’ouverture des transports ferrés à la concurrence. Est-ce le bon choix ? Nous ne le pensons pas.

Analysons enfin cet accroissement démesuré du trafic des marchandises. Est-il inéluctable ? Est-ce un progrès qui profite à l’ensemble de l’humanité ? Il apparaît, comme dans bien d’autres domaines, qu’il s’agit pour l’essentiel de renforcer la rentabilité du capital au détriment des travailleurs et des populations : il faut réduire les stocks, c’est du capital qui ne travaille pas, mais surtout organiser la circulation des marchandises entre des zones de production où la main-d’œuvre est surexploitée et les marchés solvables qui restent dans les métropoles capitalistes. Les conséquences sont le chômage dans nos pays et la misère dans les pays dominés mais aussi un environnement de plus en plus malmené. Dans cet ordre d’idées, quel est le plus probable ? Que des entreprises se délocalisent vers Tarbes, ou que des entreprises tarbaises et régionales profitent du tunnel pour se délocaliser vers le Sud ? Celui qui connaît la vallée des gaves, imaginera facilement aussi ce qu’elle deviendra.

 

TCP et transports des marchandises

 

Il est compréhensible que le débat autour de la TCP se focalise sur la défense des vallées et de l’environnement. Cependant, il s’agit, pour nous, de s’opposer à la TCP au nom d’une autre conception des transports et de la société. En effet, aujourd’hui, la priorité va au tout-camion, et au tout-voiture, générant des coûts sociaux et environnementaux insupportables.

Le transport des marchandises s’est développé trois fois plus vite que la croissance de la production. Le capital financier exige des entreprises des rentabilités à deux chiffres, entraînant filialisations, délocalisations, flexibilité accrue de l’organisation de la production et extension de celle-ci à flux tendu avec le zéro stock qui est en fait un stockage externalisé dans les camions. Et les transports routiers sont responsables d’un tiers des émissions de gaz à effet de serre qui entraînent réchauffement de la planète et dérèglements climatiques.

 

Il faut arrêter cette folie !

 

Le projet de TCP, porté par les députés des Hautes-Pyrénées et la majorité du Conseil régional (de gauche) et le gouvernement espagnol (de droite) doit être combattu, dans le cadre d’une autre logique des transports.

Nous affirmons, contre les tenants de la pensée unique, que d’autres choix sont possibles. Les lieux se multiplient où la réflexion avance sur une autre mondialisation, au service de l’humanité et non des intérêts de quelques-uns. Des vallées pyrénéennes à Porto Alegre, c’est le même combat !

 

Erika Petipain

L’eau pour la vie, pas pour les profits

            Non au barrage de Charlas

Du 8 septembre au 19 décembre 2003, dans le cadre d’un débat public organisé par la CNDP (Commission nationale des débats publics), dix réunions publiques contradictoires, dans diverses villes du Bassin de la Garonne, ont permis aux défenseurs et aux opposants du projet de Charlas de faire connaître leurs arguments, oralement, par écrit et par Internet. Depuis le 11 février 2004, la CNDP a publié son bilan. Avant le 19 mai 2004, le Smeag (Syndicat mixte d’études et d’aménagement de la Garonne), présidé par Evelyne Baylet, doit maintenant rendre publique sa décision de poursuivre le projet dont il est porteur, et dans quelles conditions.

 

Le bilan souligne l’absence totale de diffusion de l’information sur le dossier de Charlas par le journal régional La Dépêche : cette faillite montre bien la volonté de ne pas faire connaître au grand public les arguments du contre-projet ACOR (Alternative à la création de nouveaux réservoirs). Avec d’autres associations, la LCR avait demandé la création d’une commission indépendante d’expertise, afin de rétablir un juste équilibre entre les moyens de préparation et de diffusion dont avait disposé le Smeag, et ceux, ridiculement plus faibles, qu’avait pu utiliser les associations porteuses du contre-projet.

Cette expertise, accordée trop tardivement, a seulement permis de définir un cahier des charges pour des études à venir…

Rappelons la logique du projet de Charlas et ses soutiens. Sous prétexte de réguler la période d’étiage (basses eaux) de la Garonne, il s’agit de détourner chaque année 110 millions de m3, en prenant l’eau dans la Garonne à Pointis-de-Rivière (en amont de Saint-Gaudens), pour la transporter, du 1er novembre au 30 juin, par un adducteur de 18 km, jusqu’au réservoir de Charlas, qui noierait 625 hectares de terres. La vidange s’effectuerait du 1er juillet au 31 octobre, en lâchant 37 millions de m3 vers la Gascogne, par un distributeur de 32 km, et 73 millions de m3 vers la Garonne, à Muret.

Le coût du projet est au minimum 300 millions d’euros en investissement, (50 % par l’Agence de l’eau Adour Garonne, 25 % par l’État et 25 % par les collectivités locales), merci pour les entreprises du BTP qui auraient le marché.

La chanson ne nous dit pas qui gérerait plus de 2,5 millions d’euros par an en fonctionnement, rien ne garantissant la gestion publique. Ce projet est soutenu par le Smeag, dont Gaston Escudé, conseiller général PS de la Haute-Garonne, est vice-président porte-parole, la FNSEA et la Coordination rurale, le Conseil économique et social régional. Tous considèrent que l’eau est un bien marchand, dont il faut tirer profit, tout en se cachant derrière une vertueuse défense de l’intérêt général. Le PCF semble favorable, tout en restant timide. Quant au PS, il attend après les élections pour donner un avis.

Ce projet est un gaspillage d’argent public : l’eau lâchée par les barrages EDF est moins chère que celle qui viendrait de Charlas.

Le prélèvement dans la Garonne détruirait les équilibres naturels, en particulier en appauvrissant l’alimentation naturelle de la nappe d’accompagnement, qui, après s’être remplie lors des hautes eaux, régule l’étiage en redonnant de l’eau au fleuve, en période de basses eaux. Les valeurs de débit d’étiage annoncées par le Smeag sont contestées par plusieurs études et Charlas détruirait un territoire de terres cultivées. Ce barrage développerait le modèle d’agriculture productiviste : 90 % de l’eau, en été, est consommée par l’irrigation, essentiellement par la mono-culture du maïs grain, justifiée par les aides publiques subventionnant ces exploitants.

Le contre-projet ACOR et ses soutiens

 

Pour un coût de seulement 100 millions d’euros, et 2,4 millions de fonctionnement par an, le projet ACOR propose de déstocker plus d’eau des barrages EDF, de financer toutes les économies d’eau, et, surtout, de réorienter les aides pour reconvertir les cultures de maïs irriguées en cultures en sec. Ces choix politiques, cohérents avec une nouvelle PAC, maintiendraient, sans réaliser Charlas, les débits d’étiage de la Garonne pour tous les usages : domestique, industriel et agricole, dans un souci de développement soutenable.

Ce projet est porté par la totalité des associations de protection de l’environnement, la Confédération paysanne, ATTAC, de nombreux élus et scientifiques, les Verts et la LCR.

Le débat public qui a eu lieu a vu s’opposer ces deux logiques de manière irréconciliable. La balle est maintenant dans le camp du Smeag. La LCR a choisi le sien et continuera à se mobiliser contre ce projet de barrage, pour le cas où le Smeag annoncerait sa décision de le maintenir.

 

Claude Marc